Avec la dose de sérieux et d’ironie qu’il faut dans toute entreprise, je saute sur la tribune au cœur de l’espace public pour prendre la parole. Je demande à Desjardins de ne pas retirer les livrets de caisse. Le livret est à la base d’un projet de recherche portant sur l’économie de l’archive. Il est possible de lire dans les relevés d’opérations les retraits, les dépôts, les transferts au sein d’une communauté, entre les individus et les générations.
Desjardins, votre livret papier m’a permis d’imaginer le capital archives, la plus-value sur le plan de la mémoire et m’a fait spéculer ô combien d’heures. On peut lire la culture dans ces livrets et penser à qui a pris, laissé ou transmis quoi à qui comment et pourquoi?
Desjardins, votre livret papier m’a introduit au monde de l’économie, de l’échange et aux mots coopérative et populaire – mots que vous portiez jadis comme un fier étendard. Cette décision semble suivre la mode de la restructuration qui sabre la tradition et ce qui reste des services offerts par des humains au comptoir.
En faisant un détournement de son usage convenu, votre livret m’a permis de lire autre chose que des produits financiers. J’y ai lu un relevé des opérations, des transactions culturelles, qui impliquent des archives et qui génèrent des intérêts pour la communauté.
Je me souviens du mouvement pour insérer le livret dans la fente à côté du guichet et j’entends encore le son lors de l’impression des caractères numériques. Je garde ces feuillets en plus d’une copie et la métaphore vive qui anime chaque opération.